14 septembre 2010

Mange dans ta main.


Le poker ça m’a toujours fasciné. J’avais un pote y’a déjà quelques années qui jouait au casino, le vendredi ou le samedi, il se faisait pas mal de maille, 250, 500 balles, tranquille, en une soirée. Parfois il perdait aussi. Le poker ça avait l’air facile. La preuve ? : la première fois que j’ai joué j’ai gagné 8 euros, sur un carré de 5. J’avais déjà parié des allumettes avec mon frère, avant, mais je trichais. J’ai pas pensé chance du débutant, j’ai pensé que tout ce que je croyais était confirmé. J’y ai rejoué plusieurs fois, pour rien, avec de l’alcool, des jetons, un truc pro, mais je me suis fait chier, et puis j’ai perdu. Quand y’a pas de fric en jeu, c’est trop compliqué d’être sérieux, j’allais au tapis pour un oui ou pour un non, j’appelais ça « prendre le taureau par les cornes » ou « tenter ma chance », je parlais beaucoup, mais l’ambiance était là. On s’enfumait, ça avait un côté salle de jeu clandestine pendant la prohibition. Pour moi, le poker c’est un peu ça. L’argent facile, les filles, la classe, le risque, la tize et les cendres, une sorte d’art de vivre que mon pote flambeur représentait un peu. Alors je sais, les joueurs ne sont bien habillés que sur les pop-ups des sites de direct download en général, peut-être au casino aussi, mais sûrement pas au World Poker Tour mais peu importe.
Ce qui est sûr, c’est que c’est effectivement une manne à izi monnaie : en 2010 c’est un marché de 300 millions d’euros et ça devrait doubler en 2011, et cocorico, la France devrait être le 3ème marché d’Europe pour les jeux en ligne (les chiffres sont pas über-précis mais on table sur un nombre de joueurs qui doublerait ou triplerait). Ok, derrière l’Allemagne et l’Italie, mais c’est toujours mieux que de gicler en phase de poules de la Coupe du Monde de foot. Sur le site de l’expansion, un bonhomme témoigne : "J'étais perdu, je ne savais pas quoi faire de ma vie... Indirectement, j'ai voulu faire un pied de nez à la société en gagnant de l'argent sur le dos des autres, sans travailler." Il s’est fait jusqu’à 1500 € d’un coup, sur un site de poker gratuit. En ce moment, PMU poker fait de la pub pour son tournoi 100k € garantis. Si ça donne pas faim, en période de crise, je sais pas ce qu’il faut.
Enfin ça c’est en théorie. Nan parce que la France reste la France donc autant faire chier le monde le plus possible : fiscalité de bâtard (2% prélevé sur les mises) et grosses contraintes imposées pour protéger les joueurs et empêcher la triche (bye-bye Blueberry et Pat Poker), avec, attention, des « systèmes de détection des ententes entre joueurs et de détection des robots informatiques ». Comme on est malin à l’Assemblée Nationale, dès qu’un truc pourrait nous rapporter masse on fait en sorte de le presser jusqu’à la moelle. Exemple : on ne peut jouer en ligne sur un site français qu’en étant résident français, donc sur des tranches horaires françaises. En gros, internet qui permet de s’affranchir du décalage horaire ne sert plus à rien. Pas de grand tournoi avec des étrangers, ce qui était pourtant un des grands kiffs de ceux qui choisissent de jouer au poker en ligne. Finie la petite partie tranquille contre un gniaque survolté à 8h du matin, oubliée la grosse table de jeu à 4h avec des ricains et des coréens, bref c’est la mort du fun, la garantie qu’il y aura moins de joueurs, et une sacrée diminution des gains potentiels, donc des revenus qu’ils auraient dégagés. Smart. Je sais plus qui prévoit donc : « L'Etat se fourre le doigt dans l'œil car les gros joueurs vont fuir ces sites trop contraignants tant en termes de mises, que de plages horaires ou encore de compétition ». En plus y’a toutes les histoires de compte à remettre à zéro, de pertes de points de fidélités, bref pour les gros joueurs, il y a plus à perdre qu’à gagner à légaliser sa pratique en changeant de site.
Mais pour les débutants, le poker en ligne, c’est le pied. Y’a masse sites, masse conseils stratégie, au début on est pas obligé de jouer du vrai argent donc on peut apprendre sans trop de pression ni avoir à hypothéquer sa baraque, mais contre des vrais gens, sinon les mises n’ont pas à titiller celles de Casino Royale, on est tranquille devant son ordi sans besoin de lunettes noires ni de cacher que l’on bluffe, et puis on peut aussi cloper tranquille pour relâcher la pression bref c’est un peu le pied. Et quand on est déjà bon, on peut jouer à 45 parties à la fois et se faire un max de biff.
Bon bien sûr, y’a des risques d’addiction, mais on n’en est pas à une prêt.
Dans le monde de la musique aujourd’hui, celui que je consacrerais comme le joueur de poker le plus fou serait Kanye West. Je dis pas ça pour le défendre après la publication de l’article miséreux des Inrocks qui aurait dû aussi défoncer Outkast et leurs costards dégueus et Jay-Z, archétype du businessman s’il en est. Je dis ça parce que finalement, flambeur, égotique, prétentieux, jusqu’à un point inimaginable avant lui, Kanye West détonnerait partout, et encore plus dans un casino bon chic bon teint bon genre à l’ancienne, et risquerait de prendre des claques à chaque fois qu’il s’assiérait à une table, suspecté de bluffer à chaque enchère. Le problème c’est qu’à chaque main, le parvenu apparemment amateur dégaine une quinte flush. La preuve cet été encore avec les Good Fridays, ces morceaux de son prochain album balancés, logiquement, tous les vendredis. A ceux-ci s'ajoute un Runaway aux paroles ironiques performé aux VMA. En vrac, See Me Now, Monster, Power, Good Friday et Devil In A New Dress, qui présentent des featurings imparables, Bon Iver en invité de luxe, et les plus attendus Beyonce, Jay-Z, Kid Cudi, Common ou encore Nicki Minaj. De sacrées bombes soul entraînantes qui ne dorment jamais, ou encore des tueries tribales qui soulignent bien le côté colonisateur un peu bidon de Vampire Weekend, renvoyés jouer avec leur congas. La preuve, même, avec un remix de Stromae qui n’est même pas si mauvais et qui a la classe folle de faire rimer Dom-Pérignon avec Filet mignon, sans être ridicule en VO. Kanye West peut énerver autant que l’on voudra, il confine à la stupidité, ce qui dépasse, avouons-le, la mauvaise foi, de vouloir le limiter au hip-hop. Il prouve à chaque nouvel album, et je crois aussi dans chaque interview, que son ambition n’a aucune limite, et surtout pas un quelconque genre musical. Et pour l’instant, son talent ne semble pas vraiment en avoir non plus.

2 commentaires:

Automatic Druggie a dit…

A FUCKING MEN!
L'article est flambant dude, sûrement un de tes meilleurs so far et je sais bien que je "dis" ça à chaque fois mais j'avais la passion dans les veines derrière mon écran. Déjà le poker ça me parle, l'analyse est très interessante mais le paragraphe sur Kanye, c'est tout ce qu'il faut dire, tout ce qui est vrai. "son ambition n'a aucune limite" et ça messieurs "Let's have a toast for the douchebags, let's have a toast for the assholes". à la tienne vadim chéri. x

pierre a dit…

si je suis le premier à mentionner lady gaga en commentant ton post sur le poker, je gagne un point godwin 3.0 ?