18 novembre 2010

Aujourd'hui c'est niqué

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Ce soir je te vois vraiment. Ça fait cinq ans que je te regarde de haut sans te voir, mais cet enfoiré m'a largué aujourd'hui et je me retrouve comme une conne dans cette putain de chambre qu'est devenue trop grande, tout d'un coup. Toi, ma ville, t'es un peu comme cette chambre d'hôtel que j'ai pas quitté pendant trop longtemps : je te connais pas vraiment alors que j'étais en toi tout ce temps. C'est ça l'amour. Tu rencontres un mec un jour et ta vie est tellement merdique que tu fais de lui un Dieu. Il a même pas besoin de te promettre quoi que ce soit pour que tu voies en lui tout ce que t'as jamais eu. Il a même pas besoin d'être un type bien pour que tu lâches tout et le suives. Alors je l'ai suivi. Il avait de l'argent alors que j'en n'avais pas, il m'a emmené loin de toi. On a pas mal bougé dans le pays et ailleurs, mais c'est pas de ça que je parle. Je veux dire que j'ai passé la plupart de ces cinq années ici, mais que j'ai plus jamais fait attention à toi, parce que je voulais t'oublier au maximum. Oublier ces années de merde que j'ai passé dans tes rues, où j'ai tout vu. Tu m'as montré tellement de merde que forcément à la première occaz je t'ai fait un doigt d'honneur et je me suis tirée ailleurs. Dans cet hôtel au 56e étage je peux te dire que j'en n'avais plus rien à foutre. Cette tour est plantée sur ton sol mais elle monte si haut que j'ai plus jamais entendu parlé de toi. J'ai viré mes potes de ma tête et de mon répertoire, j'ai laissé tomber ce qu'il restait de ma famille, j'ai zappé mon quartier exactement comme on change de chaîne à la télé. La vie que l'autre con me proposait m'a plu, j'ai jamais voulu revenir en arrière. Mais il m'a largué alors je vais pas avoir le choix, demain matin. C'est ma dernière nuit dans cette suite qui était devenue mon quartier, ma ville à moi. J'arrive pas à dormir, évidemment. J'angoisse à mort. Un truc me calme quand même : j'ai vraiment fait la biatch avec toi et regarde, ce soir je me retrouve définitivement seule et qui est la seule qui reste ? Ben toi putain. Je t'ai fait les pires crasses à te renier, à te snober, et maintenant que la vie me rattrape par la cheville et me fout la gueule dans la boue, t'es encore là. Et je l'avais jamais vraiment vu mais t'es belle. Tu fermes ta gueule dans la nuit et tu laisses les lumières des immeubles et les néons des commerces parler pour toi devant les étoiles. Je sais pas ce que je vais faire de moi demain. Mais à te voir, toujours à la même place depuis cinq ans, à être prête à me reprendre alors que je le mérite pas, je me dis qu'il y a peut-être une réponse à mes questions dans chacune de tes couleurs que je vois depuis mes fenêtres XXL.


Booba sort son album lundi et il s'intitule Lunatic, c'est donc l'occaz ou jamais d'écouter ou de réécouter des morceaux de lui qui remontent un peu. J'ai choisi ces deux-là pour leur titre, parce qu'ils représentent les fondamentaux. "92i", sur l'unique album de Lunatic, et qui désigne un collectif qui comptait pas mal de monde à l'époque mais dont les seuls rescapés sont aujourd'hui à peu près les seuls featurings français que tu retrouveras sur l'album : Mala, Brams, et le nouveau-né, Djé. Et puis "100-8 zoo", sur l'album Temps Mort, qui désigne les Hauts-de-Seine, département que Booba est à peu près le seul à bien représenter depuis la mort des Sages Po (dsl Salif, L.I.M, Ali et consorts...).


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3 commentaires:

Anonyme a dit…

magnifique.

souklaye a dit…

Il y a quelque chose de puissant dans la détresse en te lisant.

la-funambule a dit…

Whahou mais j'adhère trop à ce blog !